1er avril 2015

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Alexandre Anctil montrant un durbec (mâle ASY) à sa fille Eva Josefine.

L’Observatoire d’oiseaux de Tadoussac n’a pas été complètement inactif pendant la saison froide. Deux projets «satellites» ont été menés à l’extérieur de la Côte-Nord par des collaborateurs bénévoles.  D’une part, Alexandre Anctil et Hilde Johansen, 2 biologistes qui ont déjà été bagueurs à l’OOT par le passé, ont poursuivi le projet de capture ciblée de Durbecs des sapins et de Jaseurs boréaux à Chibougamau. Ce projet qui a été mis en place en 2013  aux dunes de Tadoussac visait à documenter les mouvements migratoires et hivernaux de ces 2 espèces au Québec et dans le nord-est américain grâce à la pose d’une bague de couleur (jaune-verdâtre pour cet hiver).  Alexandre et Hilde avaient d’ailleurs bagué quelques individus à l’hiver 2013, mais la faible présence des espèces visées dans le secteur de Chibougamau avait alors réduit les attentes. Pour cet hiver, l’abondance de Durbecs des sapins laissait présager une meilleure récolte. Toutefois les grands froids particulièrement présents dans la région du Nord-du-Québec ont quelque peu changé les plans… Les activités de cette petite station de baguage ont en effet dû être limitées.  Le dispositif de capture qui comprenait un filet japonais positionné entre 2 sorbiers d’Amérique et accompagné de mangeoires n’a été en fonction que quelques matinées entre le début novembre et la fin janvier. Au total, 30 durbecs ont ainsi été bagués cet hiver. De plus, 19 Sizerins flammés, 4 Pics chevelus, 3 Gros-bec errants, 2 Mésanges à tête noire, 1 Junco ardoisé et 1 Mésangeai du Canada ont aussi été capturés.

Ce faible nombre durbecs bagués combiné à la très forte abondance de l’espèce dans plusieurs régions du Québec ont grandement réduit les chances d’observer un oiseau avec une bague de couleur. Ainsi, aucun oiseau avec une telle bague n’a été rapporté au Québec ou ailleurs en Amérique du Nord, ce qui montre le potentiel limité de ce type de projet pour des espèces dites éruptives. L’OOT n’entend d’ailleurs pas renouveler le projet en 2015, mais se concentrera davantage sur la pose d’émetteurs (nanotags) en collaboration avec certains chercheurs du Service canadien de la faune d’Environnement Canada.

Le Plectrophane des neiges

IMGP5488Thomas Biteau qui est également un ancien bagueur à l’OOT a fait part l’automne dernier à notre équipe de son intérêt à participer au Réseau canadien du Plectrophane des neiges (Canadian Snow Bunting Network) à partir de sa région de résidence au Bas-St-Laurent. Il a donc construit un piège (ground trap) spécialement conçu pour la capture de granivores et a tenté de façon très ponctuelle la capture de cette espèce. Pour cette première saison qui n’a pas couvert la migration printanière, 11 individus ont été capturés .  Une petite contribution à ce réseau qui compte d’importants contributeurs au Québec, dont l’Observatoire d’oiseaux de McGill. En date du 19 mars dernier, plus de 2800 plectrophanes avaient été bagués par l’OOM! Mentionnons que ce réseau a été mis en place par le professeur Oliver Love de l’Université de Windsor en Ontario, dans le but de mieux connaître les patrons de migration et de dispersion de cette espèce en déclin dans le nord-est du continent.

 

Une migration au ralenti

 Le patron météorologique qui a marqué l’ensemble de l’hiver dans le nord-est de l’Amérique du Nord semble se poursuivre en ce début avril, ce qui a pour effet de retarder la migration dans ce secteur. En effet, la trajectoire du courant-jet est relativement statique depuis plusieurs semaines et se caractérise par une position près ou au nord de la frontière canado-américaine dans l’ouest du pays pour ensuite se courber vers le sud au-dessus des Grands Lacs et passer finalement au-dessus de la Nouvelle-Angleterre. Cette situation fait en sorte que l’ouest et le centre des États-Unis connaissent depuis quelques semaines des températures au-dessus de la moyenne avec plusieurs épisodes de vents du sud favorables à la migration.  Du côté du nord-est du continent, on observe plutôt des températures sous les normales avec des poussées d’air froid répétées ce qui a pour effet de maintenir un bon couvert de neige et de nuire grandement à l’arrivée des migrateurs.

En se fiant aux échos radar des dernières semaines aux États-Unis, on constate d’ailleurs que les passereaux ont connu plusieurs bonnes nuits de migration dans le centre des États-Unis, incluant la nuit dernière où les oiseaux ont bougé en grand nombre entre le Lac Huron et les Rocheuses (voir image ici-bas). Quant au nord-est du continent, un seul mouvement digne de ce nom a été noté lors de la nuit du 25 au 26 mars dernier. Les migrateurs se sont alors essentiellement limités au sud de l’État de New-York et à la Pennsylvanie. En somme aucun mouvement nocturne n’a été observé à l’est de la ville de New-York, jusqu’à maintenant. Est-ce dire qu’il n’y a aucun passereau migrateur d’arriver dans toute cette zone? Non, mais cela signifie que les densités d’oiseaux sont très faibles et que leur arrivage se fait plutôt au compte-goutte. On constate  néanmoins dans le sud-ouest de la province que les premiers arrivants, tels que les Carouges à épaulettes et Quiscales bronzés sont notés depuis quelques jours par plusieurs observateurs.

March31-2015

Migration lors de la nuit du 31 mars 2015 aux États-Unis.

Pour ce qui est de la prochaine semaine, seule la journée de vendredi (3 avril) pourrait s’avérer être un bon moment pour aller observer les rapaces diurnes en migration. Les vents ouest combinés à une poussée d’air chaud pourraient apporter son lot de «gros formats» (Aigle royal et Pygargue à tête blanche). Au niveau de la migration nocturne, les prévisions actuelles ne semblent pas indiquer que les conditions seront favorables à un bon arrivage d’ici le 8 avril. Les ornithologues devront donc prendre leur mal en patience (encore).