Mercredi, 26 avril
Depuis le congé de Pâques, on sent que le printemps est enfin arrivé. Les oiseaux migrateurs se font de plus en plus présents. Les Juncos et certaines autres espèces de bruants sont en grands nombres dans plusieurs régions du Québec. Presque à chaque jour, il devient possible d’ajouter de nouvelles espèces à sa liste annuelle. Le cœur des ornithologues est plus léger.
Malgré tout, la province n’a pas été marqué par un arrivage significatif d’oiseaux depuis plus de 10 jours. Les oiseaux arrivent constamment, mais pas nécessairement en forte concentration. Pour qu’un tel phénomène se produise, il est nécessaire d’avoir des bonnes conditions de migration sur un vaste territoire qui s’étend des États-Unis jusqu’au Québec. Or, un tel scénario est en train de se dessiner pour la fin de semaine prochaine!
L’emplacement de différents systèmes météo favorise un vortex qui prend racine dans le golfe du Mexique pour se diriger directement vers Canada, et ce, à l’est de deux dépressions qui se trouvent en ce moment au nord du Texas et au sud du Lac Supérieur. Les vents à l’avant de ces dépressions sont franc sud, comme on peut le voir sur la carte des vents ci-dessous.
Le déplacement de ces systèmes vers l’est va propager ces vents favorables vers nos régions. La nuit dernière, on a eu droit à un avant-goût de ce qui pourra se produire à partir de jeudi soir dans les États situés au sud du Québec. Sur la carte des radars météo américains en date de 12h11 a.m. la nuit dernière (ici-bas), on peut voir des zones de précipitations sur la Nouvelle-Angleterre ainsi que le long des deux dépressions. À l’avant de ces dernières zones, on peut voir que les radars météo indiquaient une intense activité migratoire sur un secteur (encadré sur la carte) s’étalant du golfe du Mexique aux Grands Lacs.
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Prévisions
La grande question est de savoir quand cette vague migratoire d’importance va frapper le Québec! Au courant des prochaines heures, les conditions demeureront relativement mauvaises pour la migration avec des vents Est ou Nord-Est selon les régions et de faibles précipitations pour plusieurs secteurs. Considérant le déplacement des masses d’air (de l’ouest vers l’est), les premiers secteurs qui verront des conditions intéressantes sont l’ouest de la province, et ce, dès jeudi en après-midi. Selon les modèles actuels, la provenance des vents va alors virer de l’Est vers le Sud-Est et ensuite franc sud au courant de la nuit. Le risque d’averses en fin de nuit pourrait d’ailleurs favoriser la concentration de migrateurs nocturnes de façon très locale. En somme, dès la nuit de jeudi à vendredi, le sud-ouest du Québec pourrait connaître un premier front de migration d’intérêt.
Quant aux régions plus à l’est, les vents d’Est ou du Nord-Est vont se maintenir toute la journée et nuit de jeudi, ce qui va fort probablement freiner l’élan migratoire. Les conditions devraient s’améliorer à partir de vendredi p.m., alors que l’ensemble de la vallée du Saint-Laurent sera sous un régime de vents Sud-Ouest accompagnés par une poussée de chaleur significative. Ces vents vont se maintenir toute la nuit de vendredi sous un ciel dégagé. Puisque des conditions similaires seront observées dans tout l’est du continent américain, comme on peut le voir sur la carte suivante, on peut s’attendre à avoir un mouvement de grande ampleur pendant la nuit de samedi. La vague migratoire devrait alors frapper tout le Québec méridional, ce qui pourrait résulter en un important arrivage de migrateurs nocturnes, samedi matin! La matinée et début d’après-midi de samedi devraient aussi être d’excellentes périodes pour observer les migrateurs diurnes, en particulier les rapaces.
Et dimanche?
Les modèles actuels prévoient un changement de direction des vents dès samedi en fin d’après-midi. Ceux-ci vont alors virer Nord-Ouest, ce qui devrait limiter les déplacements d’envergure d’oiseaux. Ce changement de cap se fera suivant un front se déplaçant de l’Abitibi vers la Gaspésie. Dans l’est de la province, en particulier au sud du St-Laurent, les vents pourraient changer de direction qu’en soirée. Suivant ce scénario, les conditions pourraient être propices à une correction migratoire matinale de passereaux sur la Côte-Nord, dimanche matin. Toutefois, je ne prendrais pas la chance de parier sur un tel scénario, 4 jours à l’avance.
Les espèces attendues
Bien qu’on a tous très hâte à l’arrivée des parulines et autres migrateurs néotropicaux, il faudra encore s’armer de patience. Il est vrai qu’il est fort possible que certaines espèces de parulines fassent leur apparition, telles que la Paruline à croupion jaune, la Paruline des pins, la Paruline à couronne rousse et la Paruline noir et blanc. Ces 4 espèces ont pour caractéristiques d’hiverner dans le sud des États-Unis et ont donc une plus courte distance pour rejoindre nos territoires. Néanmoins, il serait surprenant d’assister à un premier arrivage important de ces espèces. On devrait plutôt avoir affaire à un mouvement de bruants, en particulier le Bruant à gorge blanche qui pourrait être accompagné des premiers Bruants à couronne blanche. Les Roitelets à couronne rubis devraient aussi arriver en force, ainsi que les Troglodytes des forêts, les Quiscales rouilleux et Grives solitaires.
Par ailleurs, ce qui est intéressant avec le scénario actuel, c’est que les possibilités « d’overshoots » sont réelles. On entend par overshoots, des oiseaux qui sont propulsés plus au nord et/ou à l’est que leur destination prévue initialement. Ça peut être des migrateurs qui viennent nicher au Québec, mais qui devaient arriver plus tard ce printemps (certaines espèces de parulines, par exemple) ou carrément des raretés!
En somme, il faudra être à l’affût ce week-end. Sur ce, je vous souhaite de belles observations.
Pascal Côté, directeur de l’OOT.